📝EN BREF
- L’acide linoléique (AL), autrefois un simple nutriment en quantité infime dans l’alimentation humaine, représente aujourd’hui jusqu’à 25 % des apports caloriques quotidiens de nombreux Américains : cela entraîne un dysfonctionnement mitochondrial et un stress métabolique durable.
- L’AL se transforme en sous-produits nocifs appelés OXLAMs qui endommagent l’ADN, perturbent la production d’énergie cellulaire et alimentent une inflammation associée aux maladies cardiaques, à l’obésité, au diabète et à la neurodégénérescence.
- Cette graisse polyinsaturée s’intègre dans votre organisme pendant des années : il faut jusqu’à six ans d’alimentation pauvre en AL pour remplacer 95 % de ce qui est déjà stocké dans vos tissus.
- Les sources courantes d’AL incluent les huiles végétales, les aliments transformés, la volaille, le porc et même de nombreux produits présentés comme « sains », tels que les beurres de noix biologiques et les vinaigrettes.
- Réduire votre consommation d’AL en éliminant les huiles végétales et en privilégiant des graisses animales stables permet à vos mitochondries de récupérer et contribue, à long terme, à réduire le risque de maladies chroniques.
🩺Par le Dr. Mercola
Les Américains consomment aujourd’hui de l’acide linoléique (AL) à des niveaux inimaginables il y a un siècle : près de 30 grammes par jour, contre seulement 2 grammes dans les années 1860. Cela a provoqué un bouleversement fondamental du fonctionnement du corps au niveau cellulaire. Cette graisse polyinsaturée (AGPI) était autrefois marginale dans l’alimentation humaine. Le corps en a besoin, mais uniquement en quantité infime. Un apport représentant seulement 1 à 2 % de vos calories quotidiennes suffit à couvrir les besoins biologiques.
Mais aujourd’hui, l’AL représente plus de 15 à 25 % des apports caloriques moyens d’un Américain. Cela est principalement dû aux huiles végétales transformées, comme celles de soja, de maïs et de colza, que l’on retrouve dans presque tous les produits emballés et dans les repas servis au restaurant. Quel est le prix de cette surcharge ? Vos cellules deviennent plus vulnérables au stress oxydatif. Vos mitochondries, les organites responsables de la production d’énergie, commencent à se dégrader.
Cette graisse se transforme en sous-produits dangereux appelés métabolites oxydés de l’acide linoléique, ou OXLAMs, qui endommagent l’ADN, perturbent la production d’énergie et entretiennent une inflammation chronique dans tout le corps. Ces OXLAMs sont associés à presque toutes les maladies chroniques qui frappent aujourd’hui les pays développés : maladies cardiaques, obésité, diabète de type 2 et même neurodégénérescence.
Et ce problème ne disparaît pas rapidement. L’AL s’incruste dans la graisse corporelle et y reste pendant des années, continuant à infliger des dommages même après l’adoption d’une alimentation plus saine. Pour comprendre comment cela est arrivé, et surtout comment l’inverser, il faut examiner ce que révèle mon article publié dans la revue Nutrients, à propos des effets biologiques à long terme de ce nutriment autrefois essentiel, devenu perturbateur métabolique.
Pourquoi chaque bouchée d’huile végétale enfonce vos cellules encore plus profondément dans le stress métabolique
Mon analyse narrative examine l’explosion de la consommation d’AL au cours du dernier siècle et comment ces niveaux astronomiques ont transformé le paysage métabolique du monde moderne. Nous clarifions comment l’AL est devenu une source calorique dominante, associée au dysfonctionnement mitochondrial et aux maladies chroniques.
• L’AL s’accumule dans les tissus et le lait maternel et est lié aux maladies chroniques : La plupart des gens consomment désormais plus de dix fois la quantité d’AL nécessaire à la santé, principalement à cause des huiles végétales transformées cachées dans la nourriture de restaurant, les encas et les condiments. Bien que l’AL soit techniquement essentiel, les niveaux de consommation actuels dépassent largement les besoins biologiques et cette surcharge crée des dommages biochimiques qui perdurent pendant des années, même après un changement d’alimentation.
• Le problème ne réside pas seulement dans la quantité d’AL que vous consommez : C’est la durée pendant laquelle il reste dans votre organisme : L’AL a une demi-vie d’environ 680 jours, ce qui signifie qu’il faut six ans d’alimentation pauvre en AL pour remplacer 95 % de ce qui est déjà stocké dans votre graisse corporelle. Contrairement au sucre ou à l’alcool, qui sont éliminés relativement rapidement, l’AL persiste dans vos tissus adipeux et continue à produire des métabolites nocifs qui stressent vos cellules au fil du temps.
• Les mitochondries de votre corps sont particulièrement vulnérables à la surcharge en AL : À l’intérieur de vos cellules, l’AL endommage une graisse appelée cardiolipine, présente uniquement dans la membrane interne des mitochondries, les structures responsables de la production d’énergie cellulaire. Lorsque l’AL remplace des graisses plus stables dans la cardiolipine, la membrane devient fragile et sujette aux dommages oxydatifs. Cela déstabilise la production d’énergie, forçant vos cellules soit à s’éteindre, soit à détruire complètement les mitochondries endommagées.
• Votre cœur et votre cerveau réagissent différemment à l’exposition à l’AL, mais les deux souffrent: La cardiolipine de votre cœur contient par défaut de grandes quantités d’AL, rendant votre cœur particulièrement vulnérable aux dommages induits par l’AL. En revanche, votre cerveau privilégie l’acide docosahexaénoïque (DHA), un acide gras oméga-3 à longue chaîne. Un excès d’AL remplace le DHA et d’autres graisses saines, modifiant la chimie cérébrale et augmentant la vulnérabilité aux pertes de mémoire, à la dépression et à la neurodégénérescence.
• Les sous-produits toxiques de l’AL attaquent directement votre ADN, vos protéines et vos membranes : La dégradation de l’AL forme des OXLAMs qui provoquent stress oxydatif et inflammation en endommageant les structures cellulaires, en inhibant les processus de réparation et en saturant les systèmes antioxydants comme le glutathion.
Les huiles végétales sont désormais la principale source de graisses dans l’alimentation moderne
Avant la révolution industrielle, la plupart des gens consommaient des graisses animales comme le suif ou le saindoux, ou des huiles tropicales comme l’huile de coco et de palme. En 2005, environ 86 % des graisses ajoutées dans l’alimentation américaine provenaient d’huiles végétales industrielles. Ces huiles sont riches en AL et largement utilisées pour la friture, la cuisson et les vinaigrettes.
• Même les aliments vendus comme « sains » sont souvent riches en AL : De nombreux beurres de noix biologiques, mélanges de fruits secs et alternatives laitières contiennent des ingrédients riches en AL. Par exemple, les huiles de carthame et de tournesol contiennent 68 à 70 % d’AL, tandis que les huiles « bonnes pour le cœur » comme l’huile d’arachide ou de colza en contiennent 19 à 32 %. À moins de les éviter activement, ces graisses s’accumulent chaque jour dans votre organisme.
• Certaines viandes influencent également votre apport en AL : Les animaux ruminants comme les vaches et les moutons convertissent l’AL alimentaire en graisses saturées et mono-insaturées, de sorte que leur viande et leur graisse restent relativement pauvres en AL, même lorsqu’ils sont nourris aux céréales. En revanche, les porcs et les poulets stockent l’AL de leur alimentation directement dans leurs tissus adipeux et musculaires. Cela signifie que le porc et la volaille conventionnels apportent des doses d’AL beaucoup plus élevées qu’attendu.
• Le lait maternel reflète l’apport en AL de la mère et change rapidement avec l’alimentation : Les mères qui allaitent et augmentent leur consommation d’AL voient généralement les niveaux d’AL dans leur lait passer de 8 à 10 % à plus de 40 % en seulement deux à trois jours. Cela montre à quelle vitesse le corps intègre les graisses alimentaires dans les tissus et comment même de courtes modifications alimentaires peuvent affecter la nutrition du nourrisson.
Les ratios modernes de graisses sabotent la santé de vos cellules
Mon article souligne également l’importance de l’équilibre entre les oméga-6 et les oméga-3, recommandant un retour au ratio ancestral de 1:1 ou 2:1. Les régimes actuels présentent des ratios oméga-6/oméga-3 de 14:1 à 25:1, favorisant l’inflammation, perturbant le métabolisme des graisses et accélérant l’apparition des maladies chroniques.
• L’AL diminue la capacité de votre corps à utiliser les oméga-3 végétaux : Des niveaux élevés d’AL perturbent les enzymes qui convertissent l’acide alpha-linolénique (ALA, un oméga-3 d’origine végétale) en oméga-3 à longue chaîne comme l’acide eicosapentaénoïque (EPA) et le DHA.
• Des études humaines à grande échelle sur les régimes pauvres en AL sont nécessaires, mais vous n’avez pas à attendre : Bien que davantage d’essais sont requis pour confirmer les bénéfices d’une réduction de l’AL sur plusieurs années, les mécanismes biologiques sont déjà clairs et les sources d’AL dans votre alimentation sont faciles à identifier. En remplaçant les huiles végétales, en limitant les aliments transformés et en privilégiant les graisses animales ou l’huile de coco, vous commencerez dès aujourd’hui à réduire votre charge en AL.
• De petits changements alimentaires maintenant entraînent de grandes améliorations de santé plus tard : Comme l’AL se stocke dans vos cellules graisseuses pendant des années, chaque repas est une opportunité de rompre ce cycle. Plus vous réduisez tôt votre consommation d’AL, plus vite vos mitochondries se stabilisent, votre inflammation diminue et votre risque de maladie à long terme s’oriente dans la bonne direction.
Réduire votre charge en AL commence par ces simples substitutions
Si votre alimentation vous semble saine mais que votre énergie, votre métabolisme ou votre inflammation ne sont toujours pas optimaux, vous négligez probablement un facteur clé : l’AL. Cette graisse s’accumule silencieusement dans vos cellules et la seule solution est de cesser d’en ajouter davantage.
La bonne nouvelle : il n’est pas nécessaire de révolutionner votre mode de vie, il suffit de faire des choix intelligents et ciblés pour réduire l’AL à la source. Voici cinq étapes que je recommande à toute personne prête à assainir son profil lipidique et à soulager ses mitochondries :
1. Éliminez les huiles végétales de votre cuisine et de votre assiette : Parcourez vos placards et jetez tout produit contenant de l’huile de soja, de colza, de maïs, de tournesol, de carthame, de pépins de raisin, de coton ou de son de riz. Ce sont les principales sources d’AL dans l’alimentation moderne.
Utilisez plutôt du ghee, de l’huile de coco, du suif de bœuf ou du beurre issu de vaches nourries à l’herbe. Ces graisses contiennent moins d’AL et sont beaucoup plus stables lors de la cuisson. Lorsque vous mangez à l’extérieur, considérez que tout contient des huiles végétales, sauf dans les établissements qui utilisent spécifiquement des graisses animales.
2. Passez à des protéines animales pauvres en AL et évitez les graisses de volaille et de porc : Lorsque vous consommez de la viande, privilégiez le bœuf et l’agneau nourris à l’herbe plutôt que le poulet ou le porc. Les animaux ruminants (vaches, moutons) convertissent l’AL alimentaire en graisses saturées plus sûres. En revanche, les porcs et les poulets stockent l’AL dans leur viande et leur graisse exactement tel qu’ils l’ont ingéré. De plus, privilégiez les œufs pauvres en AGPI provenant de poules élevées en plein air et non nourries au maïs ou au soja.
3. Réduisez votre consommation d’huile d’olive, de noix et de graines : Les noix comme les noix, amandes, pacanes et les graines comme celles de citrouille ou de tournesol sont très riches en AL. Si vous consommez régulièrement des mélanges de fruits secs ou ajoutez du beurre de noix à vos smoothies, il est facile de surcharger votre organisme. Les noix de macadamia sont pauvres en AL mais sont riches en acide oléique, une graisse mono-insaturée (AGMI) qui reste sujette à l’oxydation, surtout sous l’effet de la chaleur ou de la lumière.
En grande quantité, les AGMI perturbent la fonction mitochondriale et augmentent le stress oxydatif, rendant les noix de macadamia, et même l’huile d’olive, également riche en AGMI, problématiques. De plus, les huiles d’olive vendues dans les supermarchés américains sont souvent adultérées avec des huiles végétales bon marché et oxydées, loin d’être un aliment sain.
4. Choisissez de meilleures sources pour vos glucides et oméga-3 : Si vous comptez sur le lin pour vos oméga-3, cela ne sera pas très utile dans un environnement à forte teneur en AL. Un niveau élevé d’AL inhibe les enzymes que votre corps utilise pour convertir les oméga-3 végétaux en EPA et DHA. De plus, le lin est riche en AGPI, sujet à l’oxydation, et contient des lignanes, un type de phytoestrogène qui mime l’œstrogène et favorise les déséquilibres hormonaux.
La meilleure option est de consommer des poissons gras comme les sardines, le maquereau ou le saumon sauvage. Ils vous apportent directement les omega-3 à longue chaîne, sans conversion nécessaire. Pour les glucides, privilégiez les fruits, légumes racines et riz blanc plutôt que les en-cas transformés cuits dans des huiles végétales. Si votre intestin est sain, incluez davantage de glucides riches en fibres, comme les légumineuses, d’autres légumes et des céréales complètes bien tolérées.
5. Envisagez un supplément de bêta-alanine : La carnosine, un dipeptide composé de bêta-alanine et d’histidine, est un puissant antioxydant qui aide à neutraliser les dommages oxydatifs causés par l’AL. Elle protège les tissus en servant de cible sacrificielle pour les ROS et les produits finaux de la peroxydation lipidique avancée (ALEs) comme le 4-HNE, épargnant l’ADN, les mitochondries et les protéines.
La carnosine se trouve exclusivement dans les aliments d’origine animale, ce qui explique pourquoi les végétariens et végétaliens présentent des niveaux musculaires plus faibles et peuvent rencontrer davantage de difficultés à développer leurs muscles sans supplémentation appropriée.
Bien que des suppléments de carnosine existent, le composé est rapidement dégradé dans l’organisme, rendant la supplémentation directe moins efficace. Il est plus efficace d’augmenter l’apport en bêta-alanine, l’acide aminé limitant pour la synthèse de la carnosine, surtout pour les personnes qui ne consomment pas de viande. Les protéines animales augmentent naturellement les niveaux de carnosine, mais la supplémentation en bêta-alanine constitue une solution pratique pour les personnes végétales afin de restaurer les bienfaits protecteurs de la carnosine.
6. Réduisez votre LA au fil du temps, mais restez cohérent, il faut des années pour l'éliminer : Ce n’est pas une cure de désintoxication que l’on termine en un week-end. L’AL a une demi-vie d’environ deux ans, donc les dommages accumulés prendront du temps à s’inverser. Mais chaque repas sans huiles végétales contribue à la récupération. Chaque pas éloigné des graisses industrielles permet à vos mitochondries de se régénérer et réduit votre charge en OXLAM. Pensez à long terme. Chaque choix joue en votre faveur.
Si vous avez tout essayé, éliminer le sucre raffiné, réduire le stress, optimiser le sommeil, et que vous vous sentez encore fatigué, l’AL est probablement l’élément manquant. Le réduire n’a rien à voir avec la perfection. Il s’agit de redonner à votre corps l’espace nécessaire pour respirer. Si vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet, mais sans le jargon scientifique, vous pouvez télécharger une version simplifiée de mon article, traduite dans un langage plus simple.
🔎Sources et Références :
- 1, 2, 3, 4 Nutrients. 2023 Jul 13;15(14):3129
